EDF opte pour le site de Penly, près de Dieppe, afin d’y implanter son nouvel EPR

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C’est sur le site de 230 hectares de Penly, où les deux unités de production ont été mises en service en 1990 et 1992, qu’EDF compte construite son deuxième EPR en France, à l’horizon 2032. (Photo d’archives PN)

Énergie. La direction d’EDF a décidé de choisir le site de Penly pour construire son deuxième EPR en France. Même si la décision finale appartient à l’État, la perspective de cet immense chantier constitue une opportunité pour l’emploi.

Le choix est fait : ce sera Penly. Le conseil d’administration du groupe EDF a décidé cette semaine que le site d’accueil du deuxième EPR en France serait la centrale nucléaire de Penly, près de Dieppe. Plusieurs autres lieux étaient en compétition, dans les Hauts-de-France, mais aussi dans le sud-est du pays. Selon des proches du dossier, ce sont les qualités du site et les réserves foncières disponibles qui auraient fait la différence.

Les chiffres liés à la construction de l’EPR sont vertigineux. Selon nos informations, on parle d’un investissement de l’ordre de 15 milliards d’euros et de la présence d’environ 7 000 salariés pour construire cet équipement nucléaire de nouvelle génération. Le chantier, qui pourrait être lancé en 2024, doit durer huit années pour une mise en service en 2032. De quoi susciter des espoirs côté emploi.

« Une grande région énergétique »

« C’est une nouvelle majeure pour la région », a réagi hier Hervé Morin. Pour le président du Conseil régional de Normandie, « la région montre qu’elle est une grande région dans le mix énergétique. »

« C’est une étape importante qui est franchie », ajoute pour sa part Sébastien Jumel, le député PCF de la 6e circonscription de la Seine-Maritime (Dieppe-Le Tréport).

Une étape. Car pour l’heure, la décision prise par la direction d’EDF ne marque pas le top départ des travaux. La décision appartient in fine au gouvernement. Lors d’un récent déplacement au Creusot, le président de la République a assuré que « notre avenir énergétique et écologique passe par le nucléaire ». « Je n’ai jamais été un partisan du tout nucléaire, mais l’atome doit être un pilier dans les années à venir », expliquait Emmanuel Macron devant des industriels, ravis.

En tout cas, la décision ne devrait pas être prise avant la mise en service de l’EPR de Flamanville, en 2023, au mieux. D’ici là aura eu lieu la Présidentielle... « Quoi qu’il en soit, EDF devait faire un choix sur le site d’implantation. C’est fait », constate un proche du dossier.

Pour les acteurs normands, qui voient le nucléaire comme l’un des piliers du mix énergétique, la décision d’EDF d’installer son futur réacteur en Seine-Maritime est un juste retour des choses. « Nous sommes une grande région énergétique », martèle Hervé Morin. Il y a quelques mois, à Caen, avec de nombreux autres élus, il avait demandé au président d’EDF, Jean-Bernard Lévy, de faire le choix de la Normandie pour le deuxième EPR.

En février 2019, le président de Région avait mobilisé les élus toutes couleurs politiques confondues, hormis les Verts, pour adresser un courrier au PDG du groupe public. Dans cette lettre, les signataires renouvelaient leur demande pour Penly. « Le soutien local et régional est extrêmement important », écrivaient-ils.

Déjà, il y a plus de dix ans de cela, les élus de la région étaient allés en délégation – à l’époque Antoine Rufenacht et Sébastien Jumel en tête – plaider la cause de Penly auprès du gouvernement pour accueillir l’EPR. Le projet avait été ensuite abandonné par François Hollande. Avant de refaire surface.

 

Quant aux retards à répétition et aux milliards d’euros qu’il a fallu rajouter en cours de route pour construire l’EPR de Flamanville, ils ne semblent pas de nature à refroidir l’enthousiasme. « EDF a beaucoup appris avec Flamanville », souligne simplement Hervé Morin. Du côté d’EDF hier, c’était silence radio sur le sujet.

« C’est positif pour tout le territoire »

À Dieppe, la décision d’EDF est accueillie comme une « formidable opportunité » pour l’économie et l’emploi.

Patrice Gault, président du rassemblement d’entreprises Dieppe Méca Énergies (DME). « Bien sûr, c’est une super nouvelle pour toutes les entreprises territoriales – elles sont une quarantaine jusqu’à Cany, Gournay et la vallée de la Bresle – qui travaillent déjà régulièrement pour la centrale de Penly. Et c’est une super nouvelle pour tous les gens qui n’ont pas de travail. Cela impulse aussi de nouvelles formations à accueillir sur le territoire. Toute cette dynamique, on l’a déjà connue dans les années 2006-2007 quand la construction de l’EPR avait déjà été confirmée. Donc oui, c’est une bonne nouvelle, car ce sera un chantier intéressant. Mais pour l’instant il ne s’agit que de la décision d’EDF. Or, on sait que ce sera une décision politique au final. Aussi, nous restons prudents. D’autant que ce n’est pas encore pour tout de suite : un chantier comme cela se prépare sur plusieurs années. Mais c’est positif pour tout le territoire dieppois. »

Patrick Boulier, président de l’agglomération Dieppe-Maritime. « C’est évidemment une satisfaction pour notre territoire, une formidable opportunité alors que nous nous apprêtons à faire face à une crise économique majeure. Nous poursuivons notre objectif de faire du bassin dieppois un territoire en pointe dans la production d’énergie décarbonée avec le nucléaire, l’éolien, mais également l’hydrogène. Nous devons maintenant prouver territorialement que nous sommes capables de réunir tous les prérequis pour accueillir ce chantier d’envergure. Notre politique d’union, au-delà des divergences politiques et dans l’intérêt général, marque un premier point stratégique. À nous de poursuivre dans le même sens pour transformer l’essai. »

M. L.

m.loubet@paris-normandie.fr

 

« Une très bonne chose pour l’emploi »

Actuellement mobilisée dans la lutte contre le projet Hercule, qui vise à scinder l’entreprise EDF en plusieurs entités (un appel à la grève et des actions militantes étaient à nouveau à l’ordre du jour hier 17 décembre), la CGT de la centrale de Penly accueille néanmoins la nouvelle avec satisfaction. Même si, à en croire Nicolas Vincent, son représentant au sein du CNPE (Centre nucléaire de production d’électricité), l’information n’était pas encore parvenue aux oreilles des salariés eux-mêmes. « Oui, c’est une très bonne chose pour l’emploi et la région, commente sobrement le délégué syndical. L’EPR, c’est l’avenir de l’énergie. Cela va nous permettre de conserver des compétences sur le site. C’est la garantie d’emplois pérennes dans une région dieppoise particulièrement touchée par le chômage. »

T. D.

t.dubois@paris-normandie.fr